Le rapport annuel de la Commission nationale des sanctions est un sujet que j’ai déjà traité et qui me semble d’une importance sans cesse croissante.

Pour rappel, la Commission nationale des sanctions est une instance dépendant du Ministre français de l’Économie et des Finances. Elle est appelée à se prononcer quant aux suites à apporter aux diverses enquêtes menées par les services de l’État en matière de lutte contre le blanchiment.

Dans son avant-propos, Monsieur Francis Lamy , Président de la Commission nationale des sanctions, met l’accent sur les manquements constatés dans le chef des professionnels, toutes professions confondues. Même si des progrès sont constatés, il n’en reste pas moins que les professionnels ont accumulé un retard important dans tout ce qui concerne la lutte contre le blanchiment. Notamment en matière de prévention où les dispositifs d’identification des bénéficiaires économiques et des risques liés aux transactions étaient soit mal compris, soit totalement absents.

Il est pénible de devoir constater qu’une Directive européenne majeure, entrée en vigueur il y a bientôt un an, et depuis transposée dans tous les pays membres de l’UE, soit à ce point négligée.

La Commission nationale des sanctions a eu à sévir dans le cas de 49 personnes morales & physiques en 2017. A peu de choses près, il y a quasi égalité entre les personnes morales & physiques.

Les manquements observés sont classés en 9 catégories, allant de l’obligation de mettre en place un protocole interne anti-blanchiment à l’obligation d’effectuer une déclaration de soupçon à l’entité nationale compétente (Tracfin). Si l’on se focalise sur les 3 principaux manquements (Obligation de mettre en place un protocole interne en la matière, Obligation d’identification et de vérification de l’identité du client & Obligation de recueillir des informations et d’exercer une vigilance constante), on constate qu’ils représentent 60% des manquements sanctionnés. C’est énorme et choquant.

Cela est d’autant plus choquant qu’il s’agit là des mesures les plus simples à mettre en place dans une organisation.

C’est choquant, mais, si y réfléchit bien, pas si étonnant. Pour être en contact permanent avec des personnes soumises aux obligations découlant de la 4° Directive, force m’est de constater que le sujet ne constitue pas une priorité majeure au niveau des organisations professionnelles ou des groupements de professionnels qui devraient justement avoir un rôle de locomotive en la matière. Et certaines de ces organisations ne s’en cachent pas !

Les organisations professionnelles ne pouvant être sanctionnées, il revient aux dirigeants des entités assujetties de prendre eux-mêmes leur destin en main. Soit en implantant les dispositifs nécessaires au sein de leur entreprise ou en « secouant vivement le cocotier » au niveau de leur organisation professionnelle ou de leur groupement.

Le rapport annuel :

Pour en revenir au rapport, aucun chiffre précis n’est indiqué quant aux secteurs les plus sanctionnés. J’y suis donc allé de ma petite statistique et sur base des 20 sanctions publiées sur le site de la Commission nationale des sanctions. J’ai calculé que 4 de ces sanctions portaient sur des entreprises ayant la domiciliation dans leur activité et que le solde, soit 16 entreprises, ressortaient du secteur immobilier.

Il n’est pas inintéressant de lire le détail des différentes sanctions pour s’effarer des situations rencontrées par les agents investigateurs.

En matière de sanctions prononcées, c’est la sanction pécuniaire qui vient en tête, avec 45% des cas. 10 sanctions ont porté sur un montant supérieur ou égal à 10 000€. Il est évident qu’en la matière la Commission nationale des sanctions fait encore preuve aujourd’hui, d’une grande mansuétude et il n’est pas interdit de penser que dans les années à venir ces montants vont sensiblement augmenter.

Toujours au titre des sanctions, il est à noter qu’elle ont quasiment toutes fait l’objet d’une publication dans deux journaux. Bonjour le risque médiatique !

Dans un prochain post, je reviendrai sur les propositions et les conclusions du rapport, ainsi que sur l’analyse détaillée d’un certain nombre de cas sanctionnés. Ceci dit, j’avais déjà commenté le rapport 2015 de la Commission des sanctions et force est de constater que peu de choses ont changé. Restons optimistes !

Pour ceux qui souhaitent pousser plus loin, le texte intégral du rapport est disponible sur economie.gouv.fr.

 

 

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